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…de nouvelles évidences en démontrent l’authenticité

On aurait pu croire, à la suite de la datation au carbone 14 du Linceul de Turin en 1988, que la controverse au sujet de son authenticité serait définitivement close. Un faux datant du Moyen-âge, ont alors proclamé les experts. Et l’empressement qu’on a mis à répandre la nouvelle sur tous les toits du monde est symptomatique. Cette relique, que d’aucuns ont qualifié de «cinquième évangile», dérange! Surtout les ennemis du Christ… Et même, certains de ses amis.

Barbara Frale est parvenue à déchiffrer le sens des inscriptions imprimées en trois langues, le latin, le grec et l’araméen, autour du visage de l’homme du suaire.

Bien loin de mettre un point final au débat scientifique, la datation a provoqué depuis une cascade de recherches des plus poin­tues qui aboutissent formellement à la conclusion de son authenticité. Des preuves nouvelles qui s’ajoutent à la panoplie d’indices probants accumulés depuis que le négatif de la photo de Secondo Pia, en 1898, a révélé pour la première fois, à près de 2000 ans de distance, le visage sublime du Crucifié. Des scientifiques de haut calibre vont même jusqu’à affirmer non seulement que le drap funéraire est bien celui dans lequel Jésus —et nul autre— a été enseveli après sa mort mais on suggère également que l’empreinte de son corps a été produite par sa résurrection.

La plus récente trouvaille a été effectuée par Barbara Frale, l’historienne et archéologue de renom à l’origine de la découverte du Parchemin de Chinon dans les archives secrètes du Vatican. Ce document démontre que le pape Clément V a pardonné et réhabilité Jacques de Molay, le dernier maître des Templiers, en 1308. Une preuve qui a renversé les idées reçus, généralement malveillantes, à l’égard du rôle que l’Église catholique a joué dans l’éradication de l’Ordre.

De récents travaux, publiés au début de 2009, ont amené la scientifique à faire un lien entre l’Ordre du Temple et le Suaire. Elle croit que l’“idole” secrète, le «Baphomet», que l’Inquisition accusait les Templiers d’adorer, était en fait le drap funéraire que l’on identifiera plus tard comme le Linceul de Turin.

Barbara Frale, historienne aux archives du Vatican.

Cette association l’amène donc à effectuer des recherches sur le suaire. Les conclusions de son expertise viennent de paraître en italien dans un livre intitulé Le Suaire de Jésus le Nazaréen. À peine quelques jours après sa parution, le livre a fait le tour du monde et allume des controverses passionnées.

La sensationnelle découverte

«En 1978, écrit-elle en guise d’introduction à son livre, un chimiste et un latiniste de l’Université catholique de Milan se sont aperçus que sur le négatif de certaines photos du suaire de Turin apparaissaient des traces d’écriture: les écrits se référaient à la mort de Jésus et avaient un aspect très antique, très proche de celui d’autres témoignage remontant au 1er siècle.»

Ce constat est demeuré sans suite et il semble qu’aucun expert n’a eu l’idée de pousser plus loin l’investigation, et d’autant plus après la datation au carbone 14 de 1988. Il faut dire que les chercheurs ne disposaient pas alors de technologies et programmes informatiques nouveaux de haute définition qu’a pu utiliser la chercheuse pour son expertise.

Elle conclut que les traces d’écriture proviennent d’un «certificat de décès». De tels parchemins étaient alors d’usage pour identifier le cadavre dans les sépulcres communs. Ainsi, une fois la putréfaction achevée, après un an, les restes pouvaient être rendus à la famille.

Le certificat que Frale a pu reconstituer, en s’appuyant sur les travaux de paléographes, d’archéologues et d’historiens, est écrit dans les trois langues de l’époque de Jésus à Jérusalem: le latin, le grec et l’araméen. Il dit ceci: «Dans la 16e année du règne de Tibère (soit l’an 30), Jésus de Nazareth, mort à la neuvième heure, après avoir été condamné à mort par un tribunal romain et après avoir été reconnu coupable par les autorités juives, a été enterré avec l’obligation de rendre son corps à sa famille après une année».

Le texte, qui colle parfaitement aux récits des évangiles, a été rédigé sur un papyrus posé sur le linceul. Frale croit que les métaux contenus dans l’encre utilisée ont traversé le parchemin et laissé des traces quasi invisibles à l’œil nu sur le lin du Suaire.

Barbara est catholique. Elle o­pi­ne que le texte déchiffré n’aurait pu vraisemblablement être rédigé au Moyen-âge. Car un faussaire à cette époque n’aurait pas nommé «Jésus de Nazareth» sans faire allusion à sa divinité.
Dans sa recherche, toutefois, elle affirme avoir laissé de côté tout aspect religieux. «Ce n’est pas ma tâche de déterminer si cet homme est le Christ, fils de Dieu», écrit-elle dans la préface de son livre. De plus, elle insiste sur le fait que dans son étude, il n’est absolument pas question de «l’authenticité du suaire en rapport avec le mystère de la résurrection du Christ». Son livre vise simplement à «constater qu’il existe un document ancien qui certifie l’exécution d’un homme en un temps et un lieu spécifiques». Et il s’appelait «Yeshua ben Yoseph» (Jésus, fils de Joseph).

Les objections

La quasi invisibilité de l’écrit déchiffré n’a pas manqué de susciter le scepticisme de plusieurs experts et prélats qui croyaient jusque-là connaître à fond le Linceul. Entre autres, Antonio Lombatti, un historien du Vatican qui a écrit plusieurs livres sur le suaire: «Des gens travaillent sur des photos à gros grain et croient voir des choses», ironise-t-il.

Raymond Rogers, lors de l’examen du Suaire par 24 scientifiques en 1978.

Lombatti admet que des papyrus écrit en grec et en araméen ont déjà été trouvés dans des tombes juives du 1er siècle mais il soutient n’avoir jamais entendu parler d’inscription latine. Il rejette également l’idée selon laquelle les autorités romaines auraient retourné le corps d’un crucifié à sa parenté après avoir rempli des formalités écrites. Selon lui, les cadavres des crucifiés étaient laissés sur les croix ou jetés au dépotoir. «Le message était que vous n’aviez même pas droit à une tombe où vos proches pourront vous pleurer.»

Une opinion qui entre en contradiction flagrante avec des récits remontant au 1er siècle. Les évangiles précisent en effet que Pilate a autorisé les proches de Jésus à l’ensevelir dans une tombe nouvellement creusée aux abords du lieu du supplice. Quant à l’inscription latine, ne s’explique-t-elle pas facilement du fait de la condamnation et de l’exécution par les Romains? Dans une telle circonstance, ne serait-ce pas plutôt l’absence du latin qui pourrait être jugée atypique?

Luigi Garlaschelli, un professeur de chimie de l’Université de Pavia, Italie, soutient pour sa part que bien des choses, qui ont été vues sur le linceul se sont par la suite avérées fausses. Et il donnait comme exemple les pièces d’argent recouvrant les yeux de l’homme que les images à haute définition réalisées en 2002 n’auraient pas confirmées.

Le professeur a dirigé récemment un groupe d’experts qui ont reproduit la face du suaire en utilisant un bas-relief et du matériel disponible au 14e siècle, prouvant ainsi, estime-t-il, que le suaire a été fabriqué par une main humaine au Moyen-âge.

La datation en question

Les objecteurs ont tous ceci en commun qu’ils considèrent irréfutable le résultat de la datation au carbone 14 de 1988. Ils croient que cette méthode scientifique a torpillé pour de bon la thèse de l’authenticité de la relique.
Or, d’éminentes sommités de diverses compétences contestent ces résultats. Elles déplorent, entre autres, que le protocole exigé normalement pour valider une expertise scientifique n’ait pas été observé lors de la datation.

En 1993, une communauté internationale de scientifiques regroupant des spécialistes de haut niveau de 18 pays, dont des athées et des chrétiens de diverses confessions, se sont réunis à Rome. Leur porte-parole, le docteur Arnaud-Aaron Upinsky, mathématicien, historien et expert en système logique, déclarait en conclusion de leur symposium que «si la science soumet l’évaluation du Linceul au même niveau d’exigence épistémologique régulièrement requis pour identifier les phénomènes physiques et au vu des résultats déjà acquis, elle ne peut que conclure: l’homme du Linceul ne peut pas ne pas être Jésus de Nazareth».

La même année, des spécialistes découvrent sur une partie témoin de l’échantillon fourni aux laboratoires pour la datation, la présence de «vernis Lichenothelia», un revêtement bioplastique qui a pu fausser la mesure en Carbone 14. Un constat que confirmera plus tard une recherche de Raymond Rogers, un biochimiste américain reconnu pour sa rigueur scientifique extrême.

Au départ de son approche scientifique du Suaire, il ne croyait pas à son authenticité. Il était l’un des quelque 24 scientifiques du STURP («Shroud of Turin Research Project») qui ont ausculté le suaire sous toutes ses coutures en 1978 avec les instruments scientifiques les plus sophistiqués de l’époque. Suite à cet examen sans interruption durant cinq jours, on concluait que le Suaire n’avait été ni teint, ni peint, ni coloré d’aucune façon, que les taches sombres étaient bien du sang. Le mystère demeurait donc entier sur la fabrication de cet objet unique et sans parallèle dans le monde entier

Après la datation au carbone 14, Raymond Rogers, qui était jusque-là réservé sur la question de l’authenticité, s’est rangé du côté de l’expertise et a cru à l’hypothèse du faussaire du Moyen-âge. Il était même choqué par les théories qui n’ont pas tardé à se manifester et qui contestaient le verdict scientifique. Il se moquait d’eux en les qualifiant leurs auteurs de lunatiques.

La clef de la controverse

C’est dans cet esprit qu’il abordait la publication d’une étude de Joseph Marino et Sue Benford. Le couple n’avait aucun crédit à ses yeux, d’autant plus que ces gens n’avaient aucune compétence scientifique reconnue.
Il se donna tout de même la peine de vérifier leur thèse à l’effet que l’échantillon utilisé pour la datation, prélevé en périphérie du drap, provenait d’un reprisage invisible, selon une technique dite française, avec du coton enduit d’une teinture pour uniformiser la couleur à la partie principale, tissée exclusivement avec du lin, où apparaît l’image.

Après vérification sur des échantillons qu’il détenait, il a été bouleversé de constater que le couple avait vu juste. Il en concluait que la datation du reprisage invisible était exacte mais ne reflétait pas l’âge réel du tissu où s’est imprimée l’image. Et avant de décéder d’un cancer en 2005, il s’est déclaré prudemment convaincu que le Suaire remonte à Jésus.

La thèse de l’irradiation

Une fois admise l’ancienneté de la relique, reste entière l’énigme de l’image qu’elle contient. Les scientifiques se demandent encore comment elle a pu être produite.

Bien que spectaculaire, la démonstration de Luigi Garlaschelli citée ci-dessus n’est guère convaincante. On ne voit pas comment un sculpteur de bas-relief du Moyen-âge aurait su reproduire le corps entier, incluant la partie postérieure, d’un homme ayant subi le supplice de la crucifixion avec une vérité qui dénote des connaissances anatomiques alors inconnues, des détails sur la crucifixion non précisés dans les évangiles et que la science moderne ignorait avant d’étudier le Suaire.

Plusieurs spécialistes, dans la foulée des travaux de la NASA (l’agence spatiale américaine), qui a consacré au Suaire des centaines de milliers d’heures de recherche, ont émis l’hypothèse que l’empreinte avait pu être produite par une brève et intense radiation… Ce qui laisse entendre qu’un flux de particules atomiques aurait pu être émis par le cadavre envahi par une intense énergie lors de la résurrection.

Jean-Baptiste Rinaudo, prêtre et bio-physicien à la Faculté de médecine de Montpelier, spécialiste de médecine nucléaire, a eu le mérite de vérifier en laboratoire son hypothèse selon laquelle un rayonnement de proton a pu brunir le textile très superficiellement. Ce qui expliquerait selon lui pourquoi ceux qui ont daté le textile au carbone 14 se sont trompés. Car dans ce rayonnement, soutient-il, un flux de neutrons aurait rajeuni le tissu.

Pour le prouver, Rinaudo a pris les grands moyens. Il a utilisé une pièce de lin d’une momie âgée de 3400 ans selon une datation au carbone 14 et l’a fait irradier. Par la suite, un échantillon irradié a de nouveau été soumis à la datation au C14. «Le résultat a été spectaculaire, a révélé le scientifique, parce que la nouvelle datation a donné 46 000 ans dans le futur.»

Rinaudo a par la suite conduit d’autres expériences sur le lin d’une momie datant de l’époque du Christ dont les résultats lui font dire que «le Suaire ne peut plus aujourd’hui être considéré comme un faux du Moyen-âge». Mais est-ce le prêtre ou le scientifique qui affirme sans hésiter que le Linceul est bel et bien celui qui a enveloppé le corps de Jésus après sa mort?

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* Article paru dans Le NIC, 27 décembre 2009

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