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«Mon père, je m’accuse d’avoir pollué l’eau et l’atmosphère avec mon bateau-moteur. J’ai de plus gaspillé des ressources non renouvelables de la planète dans mes randonnées sportives en motoneige. Finalement, mon père, je suis tombé dans le péché de la consommation outrancière d’énergie fossile en acquérant pour mes déplacements une voiture dotée d’un moteur V8 plutôt que de me contenter d’un quatre cylindres.»

Un travailleur nettoie une plage polluée à la suite d’un déversement d’huile brutte dans le Golfe du Mexique (photo CNS/Lee Celano, Reuters).

Ce n’est pas demain la veille qu’un prêtre risque d’entendre un tel aveu en confession. Mais ce n’est pas la faute de nos évêques. Ils ont publié en la fête de saint François d’Assise (4 octobre 2003), une vigoureuse lettre pastorale sous le titre L’impératif écologique chrétien, qui peut contribuer à un solide examen de conscience en regard de nos responsabilités face à l’environnement.

La Commission des affaires sociales de la Conférence des évêques catholiques du Canada (CÉCC) qui signe le document se serait-elle convertie à la vertu de “Green Peace”, comme certains croyants traditionalistes —peu enclins à donner leur aval à de nouvelles morales— les en accuseraient? Une concession à l’esprit mondain, un tel discours dans le vent des courants socio-politiques post-modernistes, pourraient-ils prétendre!

Non pas! La vertu dont se réclament nos évêques est bien celle de l’Évangile. Un Évangile certes relu dans l’optique des préoccupations alarmantes et des enjeux cruciaux amenés par la crise environnementale en ce début de troisième millénaire. Déforestation, extinction des espèces, changements climatiques, fonte de la calotte glaciale arctique, effet de serre, destruction de la couche d’ozone, effondrement des écosystèmes, contamination de l’air et de l’eau, érosion des sols sont quelques-uns des effets de la tragédie planétaire évoquée par nos évêques.

«La gloire de Dieu se révèle dans le monde de la nature, et pourtant nous, les humains, sommes présentement en train de détruire la création. Vue sous cet angle, la crise écologique apparaît aussi comme une crise profondément religieuse», écrivent-ils. Et ils citent le pape à l’appui: «Prendre soin de l’environnement n’est pas une option facultative. Dans la perspective chrétienne, ce souci fait partie intégrante de notre vie personnelle et de la vie en société. Ne pas prendre soin de l’environnement, c’est ignorer le dessein de Dieu sur toute la création et résulte en une aliénation de la personne humaine… La crise écologique est un enjeu moral» qui relève de chacun (Jean-Paul II, En paix avec Dieu, en paix avec toute la création, 1er janvier 1990).

L’eau n’a pas de prix

Il y a donc lieu pour les chrétiens de vivre une «conversion écologique» dont l’un des enjeux prioritaires et immédiats concerne l’eau, la source de toute vie. «Une menace pèse aujourd’hui sur l’eau presque partout sur la terre.» La contamination des lacs et des rivières par des matières polluantes et cancérigènes rejetées par les industries, la désertification croissante en certaines régions du globe, le détournement des rivières et la construction de barrages font que l’eau douce se raréfie.

Si bien que l’eau potable, «une question de droit à la vie», est en passe de devenir «une espèce marchande, et non plus un bien public» que les pauvres dans certains pays sont forcés de payer «entre quatre et cent fois plus cher que leurs concitoyens» plus fortunés.

Un fait qui fait ressortir le lien qui existe entre l’écologie et la justice sociale. «La réponse à un droit aussi fondamental que l’accès à l’eau ne peut être laissée aux caprices des forces du marché», insistent les évêques. Car tous les humains ont non seulement «le droit de jouir d’un environnement sûr», ils jouissent aussi d’un droit «à notre sœur l’eau, qui nous est si utile et humble et précieuse et propre», selon le cantique au soleil de saint François.

Des recommandations

Nos évêques font par ailleurs observer que si les Canadiens et les Canadiennes jouissent de ressources naturelles abondantes, ils font partie aussi des habitants de la planète qui gaspillent le plus. Et ils invoquent la tradition ascétique de l’Église pour inviter les catholiques à ajuster leur style de vie «face aux exigences du consumérisme». Mais plutôt que de «fuir le monde» selon le modèle de spiritualité patristique, ils proposent «un nouvel ascétisme» qui fera, entre autres, jeûner d’actions polluantes, qui s’imposera des restrictions dans la consommation d’énergie fossile et qui prélèvera «une “dîme” en temps, en argent et en talent au service des causes environnementales».
En conclusion, la lettre pastorale rappelle que «toute la création est l’œuvre du Seigneur et elle n’est pas encore complétée. Nous sommes appelés comme co-créatrices et co-créateurs à nous joindre à l’action de Dieu pour guérir ces blessures que nos péchés écologiques ont infligées à la création.»

Note
*Article publié dans Le NIC, 23 novembre 2003.

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