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On me demande ce que je pense des multiples prophéties qui circulent et annoncent le retour du Christ à très brève échéance. Serions-nous parvenus à la fin du monde? La création serait-elle sur le point de voler en éclats?  Notre vision de la réalité —incluant celle des prophètes d’aujourd’hui, vrais ou faux— a changé considérablement depuis l’Antiquité. Au point de modifier notre perception de la vérité chrétienne. Dans le contexte de la pensée moderne, il n’est plus tant question de la fin DU monde que de la fin D’UN monde.

Des événements tels que l’attaque contre le WTC évoquent l’Apocalypse (photo CNS/Sean Adair, Reuters).

La nuance est capitale. Elle fait toute une différence. Derrière ce détail d’apparence anodine, elle révolutionne radicalement la conception eschatologique qui a dominé la pensée chrétienne pendant deux millénaires. Rien de moins!

Tant que l’on croyait que notre planète, avec son humanité solitaire, était sise immobile au centre d’un cosmos qui lui faisait la ronde, l’on pouvait imaginer une fin abrupte de la création coïncidant avec le destin de l’humanité. «En ce jour, les cieux se dissiperont avec fracas, les éléments embrasés se dissoudront, la terre avec les oeuvres qu’elle renferme sera consumée» (2 Pi 3, 10).

Saint Pierre était tributaire des conceptions de son temps. La destruction universelle par le feu était un thème récurant, tant chez les philosophes gréco-romains que dans les milieux religieux juifs.

Mais depuis que nous savons que le ciel avec son flambeau, son lampadaire de lune et son élégant cortège de planètes et d’étoiles ne tournent plus autour du nombril de l’humanité, la perspective a changé. Depuis que nous savons que notre soleil est positionné à la périphérie d’une galaxie formée de milliards d’autres étoiles de tous gabarits, depuis que nous savons que notre Voix lactée se situe dans la bonne moyenne de millions d’autres galaxies à des milliards d’années-lumière dans un espace vertigineux en constante expansion, depuis que nous savons que notre univers est né d’une gigantesque explosion, il y a quelque 14 milliards d’année, depuis…

Il est bien difficile de croire qu’un jour cet inconcevable univers devra s’envoler en fumée parce que notre pauvre petite humanité, perdue sur le minuscule grain de sable de notre planète, sera parvenue à l’heure du jugement. Est-il d’ailleurs vraisemblable que Dieu ait créé l’univers pour ensuite le détruire par un cataclysme… en conséquence des péchés de l’humanité? Que l’envers du décor de la création serait un «Big Bang» destructeur?

Dieu n’est pas illogique. Pourquoi détruirait-Il ce qu’Il a d’abord si bien réussi? Il n’est pas du genre potentat qui fait et qui défait au gré de ses caprices. Non, l’explosion gigantesque est au lancement de la création et non à sa conclusion. «Que la lumière soit!» Et la matière fut. Elle fut créée pour durer jusqu’à ce qu’elle retourne à la lumière de Dieu, en passant par les hommes… et les anges.

Les anges, ces extra-terrestres

Et si nous n’étions pas les seuls? Il n’est plus farfelu aujourd’hui de penser que, parmi le nombre astronomique d’astres —c’est le cas de le dire—, des planètes comme la nôtre gravitant autour d’autres soleils puissent abriter aussi de la vie intelligente. L’hypothèse ne serait pas aussi éloigné de la révélation chrétienne qu’on pourrait le croire.

Mais quoi! Dieu n’a-t-Il pas créé des myriades de myriades d’anges? Ne serait-ce pas pour servir et dominer sur d’autres mondes émergeant de cette masse incommensurable de matière cosmique? Et si l’univers était une gigantesque machine à fabriquer des êtres intelligents —anges et hommes— capables d’aimer? D’aimer Dieu par-dessus tout!

Les connaissances astrophysiques d’aujourd’hui nous imposent une révision de notre conception chrétienne de la conclusion de l’Histoire. Il est devenu incontournable de remettre en question l’interprétation traditionnelle de l’apocalypse.

Et c’est pourquoi, même les mystiques parlent plus volontiers aujourd’hui de la fin d’un monde. Un point final, certes, mais limité, contenu à l’intérieur des frontières de notre monde planétaire et non qui concernerait le cosmos tout entier.

Dans cette optique, chaque planète abritant la vie —s’il en existe d’autres que la nôtre, bien entendu— a pu ou pourra avoir sa propre apocalypse. L’événement dramatique ferait partie de la structure de la réalité dans tout l’univers. Il s’agirait d’une étape décisive de l’évolution faisant suite aux choix qui déterminent le destin bon ou mauvais des mondes, synthétisés pour l’éternité en ceux que l’on appelle encore les anges ou les démons.

Pas si fou que ça, donc, l’hypothèse de la pluralité des mondes. En tout cas, il n’est pas interdit de relire l’Apocalypse de saint Jean dans cette perspective.

Nouvelle création

C’est étonnant ce qu’on pourra y découvrir de décapant pour l’interprétation traditionnelle et de confortant pour une lecture plus moderne. J’ai toujours été extrêmement marqué par un passage particulier de ce livre sibyllin.

Nous sommes ici situés après la grande guerre eschatologique. La der des ders. La victoire des élus est acquise. Les démons avec ceux qui font le mal sont jetés pour toujours dans l’étang de feu. C’est terminé pour eux. Un «ciel nouveau et une nouvelle terre» apparaissent. Dieu essuie «toute larme de leurs yeux: de mort, il n’y en aura plus; de pleur, de cri et de peine, il n’y en aura plus, car l’ancien monde s’en est allé».

C’est alors que «Celui qui siège sur le trône» déclare: «Voici, je fais l’univers nouveau» (Ap 21, 1-5). Le timing est significatif. Au moment où tout s’apaise et se conclut, Dieu dit qu’Il va recommencer autrement l’aventure de la création, qu’Il va faire du neuf et du différent.

C’est à faire péter les boulons, n’est-ce pas? De joie, bien sûr! Quand l’ouvrage est terminé, on recommence… Dans Son ciel, le Bon Dieu a Ses plans. On ne passera pas l’éternité à ne rien faire. Il a déjà en vue tout le boulot qu’on pourra faire avec Lui pour créer du plus beau et du plus grand encore.

Le combat eschatologique

Mais avant d’en arriver là, on a un combat à livrer. Saint Jean en anticipe le déroulement. Son livre décrit la lutte qui s’enclenche sur la terre à la suite de la révélation du salut par le Christ. L’humanité se divise alors en deux camps: ceux qui accueillent ce salut gratuit et ceux qui le refusent. Ces derniers sont représentés par la synagogue de Satan, qui n’a pas reconnu le prophète Jésus, et Babylone, la «grande cité» qui «se saoulait du sang des saints et du sang des martyrs de Jésus».

Mais qui est cette «prostituée fameuse»? Jean fait-il simplement allusion à l’empire romain, comme on l’a répété? Au-delà de cette interprétation ponctuelle, ne ferait-il pas aussi référence à quelque chose de plus profond, de plus fondamental dans la structure de l’humanité?

Il faut relire tout le chapitre 18 pour comprendre que la fin à laquelle l’Apocalypse fait allusion, c’est la fin de cette inévitable réalité sociale collée à l’humanité que l’on appelle “civilisation”. La nôtre, dite occidentale, est certes née dans le creuset du christianisme mais elle est devenue anti-chrétienne, fondamentalement, toute axée qu’elle est aujourd’hui sur les valeurs de l’économie, des biens de consommation, du luxe, des richesses, du commerce, des plaisirs désordonnés, etc. Des valeurs aux antipodes de celles de l’amour, de la fraternité, de la justice et du partage que le christianisme authentique voudrait instaurer sur la terre.

Par son néo-paganisme, la civilisation moderne ne tue pas directement les chrétiens, mais plutôt le christianisme. Or, «en un seul jour, des plaies vont fondre sur elle: peste, deuil et famine; elle sera consumée par le feu… une heure a suffi pour consommer sa ruine» (18, 8;19).

Le noeud du problème

Serions-nous parvenus à cette heure dramatique? Le compte à rebours serait-il enclenché? La ruine de notre civilisation serait-elle à nos portes?

Si l’on jette un regard furtif sur l’état de notre monde actuel, on devra bien admettre que les choses ne pourront pas durer ainsi indéfiniment. No­tre vie sociale ne pourra pas continuer ainsi longtemps à se dégrader. L’humanité est en train de sombrer dans un marasme moral qui affecte tous les secteurs de notre vie collective. Plus rien n’échappe au pourrissement, à la corruption, à la perdition en chute libre de millions d’être humains. Les plaies qui causeront la ruine de Babylone l’affectent déjà. Notre civilisation est déjà marquée pour la destruction.

«Elle est tombée, elle est tombée, Babylone la Grande; elle s’est changée en demeure de démons, en repaire pour toutes sortes d’esprits impurs, en repaire pour toutes sortes d’oiseaux impurs et dégoûtants. Car au vin de ses prostitutions se sont abreuvées toutes les nations, et les rois de la terre ont forniqué avec elle, et les trafiquants de la terre se sont enrichis de son luxe effréné» (Ap 18, 2-3).

La question en question

À la question de savoir si la fin du monde est proche, je répondrai donc de deux façons. D’abord que nous y sommes déjà. Elle n’est pas à venir, nous nageons en plein dedans. Notre monde se décompose et Babylone est jetée à terre.

Deuxièmement, je ne perdrais pas mon temps ni ma sérénité à attendre avec expectative quelque événement spécial du genre catastrophe mondiale en cinéma IMAX et DOLBY stéréo. Car il est très possible que les grands événements apocalyptiques nous passent sur le dos inaperçus à nos yeux qui donnent habituellement plutôt dans la myopie. Et cependant que nous serions tout attentifs à rechercher des signes spectaculaires, nous risquerions de manquer le bateau du monde nouveau, qui est aussi déjà là, qui est déjà en train de surgir, comme une fleur merveilleuse, des ruines actuelles.

Conclusion non concluante

Ce n’est pas tout, cher lecteur! J’en ai encore tout plein à écrire. Mais ne t’en fais pas! Ce n’est pas une catastrophe apocalyptique. Un deuxième article complète ma pensée. Attends-toi à des surprises!

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3 réponses à 1- Pour bientôt, la fin du monde?*

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