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…il est dans le Présent de Dieu

Quand j’ai appris la nouvelle du décès du père Parent, mon cœur s’est mis à pleurer pour l’absence humaine que cela représenterait jusqu’à ma propre mort, mais mon âme a bondi de joie pour lui, parce qu’il était enfin dans les bras de son Père qu’il a tant aimé et si bien servi. Je l’ai choisi plusieurs fois comme animateur spirituel des pèlerinages que nous organisions, mon mari et moi, vers Medjugorje, la Suisse, la République dominicaine et la Terre Sainte, etc. J’ai donc eu maintes occasions de le côtoyer, de l’observer, de l’aimer. Merci mon Dieu pour ce privilège!

Après la messe célébrée en l’honneur de son 50e anniversaire sacerdotal en 1987, le père Parent a félicité l’homéliste en lui disant qu’il avait eu l’impression d’assister à ses funérailles. Il lui a conseillé de garder son discours dans ses dossiers. «Ca pourrait encore servir», lui a-t-il, pince-sans-rire (photo OMMI).

Je l’appelais Papa Parent. C’est osé, n’est-ce pas, d’appeler ainsi un prêtre avec qui je n’avais aucun lien de parenté biologique? Je vous explique. La première fois que je l’ai rencontré —j’étais dans les débuts de la quarantaine—, j’ai immédiatement reconnu en lui ce que j’avais gardé comme souvenir de mon père que j’ai perdu alors que j’avais six ans: la bonté. Le père Parent était d’une extrême bonté! Et mon cœur l’a instantanément adopté.

C’était tellement facile d’adopter le père Parent. Il avait le grand don d’a­bolir toute distance avec les gens qu’il rencontrait. Pas de masque, pas de faux-fuyant, pas d’enrobage social inutile. Un cœur sur pattes, le père Parent! Qui n’avait qu’un seul but: aimer, c’est-à-dire, faire sentir à l’autre qu’il est un frère, une sœur, un enfant de Dieu, un membre de sa famille, quoi!

J’ai vu cet homme agir dans les circonstances les plus diverses: état de tension, de tristesse, de déracinement, de contrariété, de chutes humaines évidentes (chez des êtres dont il avait la charge spirituelle), etc. Quelle était sa réaction, son attitude? Amour, sérénité, compassion, confiance, miséricorde, espérance. Il modelait son agir sur Celui qui l’avait choisi et qu’il avait joyeusement accepté de suivre: le Christ.

En d’autres mots, je n’ai aucune hésitation, personnellement, à le ranger du côté de nos saints contemporains, nos Grands, la Petite Thérèse, Mère Teresa, sœur Emmanuel (du Caire), le curé d’Ars et bien d’autres, qui sont restés cachés, inconnus et qui le demeureront peut-être, soit parce qu’ils le voulaient ou à cause de notre aveuglement.

J’y vais un peu fort? Oh que non! Sachez que le père Parent était un géant de la foi. Un ingénieur-expert spirituel. Un constructeur de ponts entre l’homme et Dieu, un défricheur de sentiers que tous et chacun peuvent emprunter pour se sanctifier. Sa «recette facile» de sainteté ne rappelle-t-elle pas les méthodes de la Petite Thérèse?

La spiritualité des 5/5/5 

Le père Louis-Marie Parent a développé une spiritualité particulière, appelée «la mystique des
5-5-5», accessible à tous, que l’on soit membre de l’un des instituts qu’il a fondés ou un laïc sans statut particulier dans le monde.

Par le premier 5, le chrétien développe une vie d’intimité avec le Seigneur dans la prière quotidienne par les exercices spirituels suivants:

  • l’oraison ou la méditation
  • la lecture de la Parole de Dieu et d’oeuvres de spiritualité
  • l’Eucharistie
  • la dévotion au Saint-Sacrement
  • la dévotion à la Vierge Marie, en particulier par la méditation des mystères du Rosaire et la récitation du chapelet.

Par le deuxième 5, le chrétien cultive particulièrement l’esprit de recueillement, d’humilité et de charité fraternelle par les attitudes suivantes

  • Présence de Dieu: il recherche la présence de Dieu en vivant le moment présent
  • Absence de critique: il porte un regard aimant sur les personnes et accueille le Christ présent en elles en évitant toute critique destructive extérieure ou intérieure
  • Absence de plainte: il s’ouvre à l’émerveillement pour découvrir et accueillir la présence du Christ dans les événements en évitant toute plainte inutile extérieure ou intérieure
  • Être de service: il assume pleinement ses responsabilités et aime servir ses frères et ses soeurs avec gratuité et empressement à la manière de Jésus
  • Être un artisan de paix: il s’applique à garder la paix du coeur pour instaurer un climat évangélique de justice et de fraternité afin d’être un instrument de réconciliation dans son milieu.

Par le troisième 5, le chrétien saisit chaque jour cinq occasions concrètes d’exercer la charité fraternelle afin de s’entraîner à vivre les contacts avec autrui d’une façon positive, tout comme Jésus l’a enseigné.

Les fruits

Maintenant, que dire des fruits que cette âme a produits de son vivant? La fondation avec deux montréalaises —Rita Renaud et Jeannette Roy— (en 1943) des Recluses missionnaires, un ordre de religieuses contemplatives dont la vie toute entière se veut «adoration du Père, par Jésus, dans l’Esprit».

La fondation (en 1952) des Oblates de Marie Immaculée, un institut séculier dont les membres laïques «consacrent leur vie à Dieu et contribuent, par leur présence et leur travail, à transformer le monde de l’intérieur, à la manière d’un levain». Un institut qui rayonne sur quatre continents et touche plus d’une vingtaine de pays.

Et encore, la fondation des Voluntas Dei, un autre institut séculier «une famille de baptisés consacrés au sein de l’Église catholique romaine qui, comme une force vive et à la manière d’un levain dans la pâte, collabore à l’avenir d’un monde plus humain et plus fraternel.» Aujourd’hui cet Institut compte 752 membres répartis comme suit: un évêque, 141 prêtres, 6 diacres, 35 laïcs célibataires, 71 séminaristes et 498 personnes mariées associées. Leurs membres sont établis dans 16 pays dont: le Canada, le Chili, la Colombie, Cuba, l’Écosse, l’Équateur, les États-Unis, l’Éthiopie, la Guadeloupe, Haïti, l’Inde, l’Italie, le Laos, la République dominicaine, le Sri Lanka et l’Ouganda.

En voulez-vous plus? Nous sommes allés à ses funérailles, mon époux (Paul) et moi. Quelle magnifique cérémonie empreinte de joie. Oui, de joie! Non pas un sentiment factice, mais une satisfaction profonde, une certitude spirituelle de savoir l’être aimé arrivé à bonne destination, d’avoir un allié de plus au Ciel. 97 prêtres et trois évêques (qui ont concélébré) s’étaient déplacés pour l’occasion! La basilique Notre-Dame du Cap (Cap de la Madeleine) était remplie jusqu’en arrière.

Il y avait de nombreux Oblats —son ordre religieux—, des Oblates laïques de plusieurs pays, des membres des Voluntas Dei, des Recluses missionnaires, des membres associés des instituts séculiers, des chrétiens ordinaires qui ont un jour croisé le chemin de cet apôtre. Fallait entendre les partages entre les participants, dont plusieurs lui devaient leur choix de vie tournée vers Dieu: tristesse bien sûr, d’avoir perdu ce père spirituel qu’étaient pour beaucoup le père Parent, ce prêtre au zèle évangélique peu commun, mais c’est vraiment l’allégresse qui primait, celle, je le répète, de le savoir enfin dans les bras du Père, après presqu’un siècle (il aurait eu 99 ans le 12 juillet), d’une vie toute donnée à Dieu et à ses enfants. Cette cérémonie, en fait, ressemblait bien plus à des épousailles (je pensais au banquet des noces de l’Agneau,  Ap 19, 1-10) qu’à des funérailles. C’est d’ailleurs le carillon de joie qui sonnait au sortir de l’église (quelle idée heureuse!), non pas le triste glas!

J’ai la profonde conviction que le père Louis-Marie Parent a quitté notre monde avec l’idée profondément ancrée de passer son Ciel «à faire du bien sur la terre», à l’exemple de la Petite Thérèse. J’ose espérer que les responsables de son ordre religieux et les chefs de l’Église ne perdront pas de temps pour monter le dossier nécessaire à sa cause en béatification. C’est un véritable saint qui a quitté notre planète. Sachons le reconnaître afin d’avoir au plus vite un nouveau saint québécois à imiter. Notre Église du Québec et d’ailleurs en a un urgent besoin.

* Article paru dans Le NIC, 14 juin 2009.

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