2. C’est la première encyclique d’un pape jésuite : on y retrouve la méthode du dialogue : « Dans la présente Encyclique, je me propose spécialement d’entrer en dialogue avec tous au sujet de notre maison commune ». Et de la contemplation du mystère du Christ, l’acuité du discernement, l’examen de conscience et l’objectif de l’action. L’unité entre contemplation et action.
3. C’est la première encyclique sur l’écologie de l’histoire de l’Église, même si elle se situe dans le sillage des papes Jean XXIII, Paul VI, Jean-Paul II et Benoît XVI, très cité, et dans la tradition des saints : François d’Assise, Bonaventure, pour les Franciscains, mais aussi Thérèse de Lisieux et Jean de la Croix, et Charles de Foucauld.

4. C’est la première encyclique d’un pape présentée dans la  Nouvelle salle du synode : l’intérêt mondial suscité par le texte a attiré à Rome tant de journalistes que c’était impossible de les accueillir tous dans la salle de presse du Saint-Siège.

5. C’est la première encyclique d’un pape présentée par un représentant du patriarcat œcuménique de Constantinople : le métropolite Jean Zizioulas a été envoyé par le patriarche Bartholomaios, lui-même cité par le pape dans son encyclique comme une des sources importantes de l’enseignement chrétien sur la préservation de la création.

6. C’est la première fois qu’une encyclique suscite, immédiatement, une proposition de la part de l’Orthodoxie : le métropolite a proposé l’institution d’une Journée de prière commune des chrétiens pour la préservation de la planète.

7. C’est la première fois que deux femmes, laïques, participent à la présentation d’une encyclique papale, avec une expérience de terrain : Mme Carolyn Woo (Catholic Relief Services, des États-Unis) et Mme Valeria Martano, de Rome.

8. C’est la première fois qu’un pape choisit explicitement la date de publication d’une encyclique en anticipant une échéance internationale qu’il espère inspirer. Dans l’avion de Colombo à Manille, le 15 janvier dernier, le pape  s’est dit déçu par les résultats de Lima 2014 et il espérait plus de courage à Paris: « L’important est qu’il se passe un peu de temps entre la sortie et la rencontre de Paris, afin qu’il s’agisse d’une contribution. La rencontre au Pérou n’a pas donné grand’ chose. J’ai été déçu par le manque de courage : ils se sont arrêtés à un certain point. Espérons que les représentants à Paris seront plus courageux et feront avancer les choses. »  La France présidera en effet la 21ème Conférence des Parties de la Convention cadre des Nations unies sur les changements climatiques de 2015. La conférence aura lieu du 30 novembre au 11 décembre 2015, à Paris, sur le site Paris-le Bourget. Le pape disait notamment : « Quand tu t’appropries trop la création et que tu dépasses une limite, cette culture se retourne contre toi. Pensons à Hiroshima. »

9. Une première aussi que le pape ait lui-même expliqué la genèse de son encyclique, toujours dans l’avion : « C’est le cardinal Turkson, avec son équipe, qui a préparé une première mouture de l’encyclique. Ensuite, j’y ai travaillé moi-même avec l’aide de certains. Puis, avec des théologiens, j’ai fait la troisième version,  et maintenant j’ai préparé la troisième version et j’en ai envoyé une copie à la Congrégation pour la doctrine de la foi, à la deuxième section de la Secrétairerie d’État et au théologien de la Maison pontificale, pour qu’ils vérifient bien que je ne dise pas de « bêtises ». Il y a trois semaines, j’ai reçu leurs réponses, certaines grandes comme cela, mais toutes constructives. Et maintenant, je prendrai une semaine entière, en mars, pour l’achever. »

10. Pour la première fois une encyclique parle longuement de l’Amazonie et des populations indigènes. Il l’annonçait dans l’avion : cela a été pour lui au départ un point d’incompréhension, puis le cardinal Bergoglio a lui-même agit contre la déforestation de l’Amazonie : « Je me souviens – vous avez déjà entendu cela – d’un vieux paysan qui m’a dit un jour: « Dieu pardonne toujours, nous, les hommes nous pardonnons parfois, la nature ne pardonne jamais. » Si tu la gifles, elle le fait aussi. Je crois que nous avons trop exploité la nature: la déforestation par exemple. Je me souviens qu’à Aparecida, je ne comprenais pas bien le problème quand j’entendais les évêques du Brésil parler de la déforestation de l’Amazonie, je n’arrivais pas à bien comprendre. L’Amazonie est un poumon du monde. Puis, il y a cinq ans, avec une commission pour les droits humains, j’ai présenté un recours devant la Cour suprême de l’Argentine pour arrêter, au moins de façon temporaire, une déforestation terrible dans le nord du pays, à Salta, Tartagal. C’est un aspect. Et puis, il y a la monoculture. Les paysans, par exemple, savent que si tu cultives du blé pendant trois ans, tu dois ensuite t’arrêter et faire une autre culture pendant un-deux ans, pour refaire les nitrates de la terre, pour que la terre se régénère. Par exemple, aujourd’hui, chez nous, on ne cultive que le soja et on fait du soja jusqu’à ce que la terre s’épuise. Tous ne font pas cela. Mais c’est un exemple, il y en a beaucoup d’autres. Je crois que l’homme est allé trop loin. »

11. C’est la première fois qu’un embargo est grillé par un journaliste pour une encyclique : elle a été publiée en italien en début de semaine. C’est peut-être révélateur de la fièvre qui entourait cette encyclique et les intérêts économiques et politiques en jeu.

Mais le pape avait lui-même proposé des clefs de son texte dès dimanche à l’angélus et de nouveau mercredi à l’audience générale : une façon de prévenir les lectures erronées. On pourra lire dans Zenit en français ces interventions du pape (faites en italien).

12. En lisant l’encyclique, on trouvera d’autres « premières » : autant de pépites à découvrir, car jamais une encyclique n’a été aussi facile à lire et à comprendre. Pas de jargon. Mais des expressions qui restent dans l’esprit et dans l’oreille, comme une  incitation à changer de route.

Celle-ci par exemple : « La disparition de l’humilité chez un être humain, enthousiasmé malheureusement par la possibilité de tout dominer sans aucune limite, ne peut que finir par porter préjudice à la société et à l’environnement » (n. 224).