Ainsi, devrait-on en conclure, l’Église québécoise —épiscopat, clergé, communautés, laïques— ne serait plus dans les faits catholique romaine mais dans un état de schisme larvé avec Rome! L’historienne s’est efforcée d’étayer un tel constat en relevant les doléances habituelles de la dissidence contre l’Institution ecclésiale.
La série noire des récriminations est constituée comme toujours d’un corpus disparate: le mariage des prêtres, la contraception, l’accès des femmes au sacerdoce et des divorcés-mariés à l’Eucharistie, les normes liturgiques, le traitement de l’homosexualité, les mesures disciplinaires contre les théologiens déviants, l’infaillibilité pontificale, etc. Le tout étalé sur l’arrière-scène des scandales sexuels et des épisodes rocambolesques médiatisés autour du condom et de l’avortement de la petite brésilienne.
Je ne prétendrai pas qu’il n’y a rien de discutable, rien à changer en regard de cette litanie de lamentations. Ce que l’on peut reprocher à l’aile dissidente, ce ne sont pas tant les remises en question de certains fonctionnements administratifs de l’Église que le fait de fourrer, sans discussion et sans chercher à discerner la volonté de Dieu, tous les sujets de litige dans le même sac —comme s’ils étaient tous de même niveau et de même importance— pour ensuite lancer le tout comme une bombe sur la place publique. Si l’on veut ainsi changer l’Église de l’intérieur, comme certains le prétendent, je ne crois pas que ce soit la bonne méthode. On accélère plutôt sa démolition.
Le célibat en question
Prenons, par exemple, le dossier du célibat obligatoire des prêtres. Tout le monde sait que c’est une question de discipline ecclésiale. La pratique actuelle pourrait changer. Alors —ce n’est pas sorcier!—, parlons-en calmement, rationnellement, lucidement, sans fulminer de part et d’autre des anathèmes ou publier des réprobations à l’emporte-pièce.
Est-il bien vrai qu’un clergé marié répondrait mieux qu’un clergé célibataire aux besoins spirituels du peuple de Dieu? L’Église deux fois millénaire bénéficie d’une longue expérience de ce côté. Elle a acquis une sagesse souvent inaccessible aux intellectuels conformés à l’esprit mondain, qu’ils soient évêques ou théologiens de renom. Ne prenons donc pas les chicanes de carriéristes en quête de positions avantageuses pour de l’argent comptant! Car il n’y a pas ici de quoi faire un plat!
Ce qui est surtout en jeu dans ce dossier, ce sont des questions pratiques plutôt terre-à-terre et non doctrinales. Durant tout le premier millénaire, le clergé de l’Église latine pouvait être marié. Aujourd’hui, certains pasteurs convertis du protestantisme et ordonnés catholiques sont mariés et personne ne s’en plaint. Les Églises orientales en communion avec Rome ainsi que les Églises orthodoxes confèrent encore l’ordination sacerdotale à des hommes mariés selon une tradition qui remonte aux apôtres.
Mais lorsque le sujet est à l’ordre du jour de synodes ou autres événements œcuméniques, les délégués de ces Églises exhortent l’Église latine, qu’ils envient sur ce point, à maintenir le célibat. C’est symptomatique, n’est-ce pas? Leur position s’appuie sur l’expérience concrète des difficultés qu’il y a à concilier les responsabilités familiales et le ministère sacerdotal.
Que l’on songe seulement à l’insoluble problème financier qu’impliquerait un clergé marié chez nous dans le contexte de communautés chrétiennes en déclin et à l’heure de la démolition ou de la vente d’églises par manque de ressources. La décroissance est déjà un problème énorme qui pourrait être catastrophiquement amplifié par l’obligation de rémunérer des prêtres responsables de familles.
Avant de songer à ordonner des hommes mariés à l’échelle de l’Église universelle, il faudrait alléger considérablement le poids des structures paroissiales. Dans un nouveau contexte de communautés chrétiennes réduites mais vivant plus intensément l’engagement de la foi, mon avis est que l’Église pourrait ordonner des hommes mariés à la retraite (et non à marier des prêtres déjà ordonnés —la nuance est capitale) et jouissant d’une indépendance financière. Leur service à la communauté locale, dégagé de toute responsabilité administrative, pourrait alors être considéré comme un apport généreux et désintéressé à la mission. Cette ouverture pourrait s’étendre éventuellement à des personnes exerçant un métier ou une profession qui leur laisserait le loisir de desservir bénévolement la vie spirituelle et sacramentelle de petits groupes communautaires.
Il ne s’avère pas impossible que la discipline de l’Église évolue dans cette direction sans que la mission sacerdotale en subisse une dégradation. Les circonstances sociales et l’Esprit Saint pourraient l’y conduire. Quoi qu’il en soit de la pratique actuelle et de la fermeté du Magistère sur la question du célibat, il n’y a pas là de quoi monter aux barricades et fomenter une révolution… ou un schisme.
Le sacerdoce au féminin
Le refus du Vatican de conférer l’ordination sacerdotale aux femmes agace souverainement la dissidence. Personnellement, je n’ai aucune velléité de discrimination féminine. Je suis convaincu de la valeur de la contribution des femmes à l’humanité et à tous les niveaux de la vie sociale. Humainement parlant, je n’aurais aucune difficulté à accepter que des femmes puissent être ordonnées à la prêtrise. Il y a une trentaine d’années, j’ai même signé un éditorial intitulé: «Une femme pape! Pourquoi pas? …si Dieu le veut!» Pour moi, tout est là! Ma réponse à cette question tient dans les trois points de suspension et ce qui suit. «…si Dieu le veut!»
Actuellement, tout indique qu’Il ne le veut pas. Et Il a sûrement de bonnes raisons. Elles me sont communiqués par notre Saint-Père le pape. Ce n’est pas que je me range servilement sous le dogme de l’infaillibilité. Mais je crois qu’il a un accès spécial au plan de Dieu pour son Église. Il voit plus loin que le bout de mon nez. Conscient de mes limites, je m’appuie fidèlement sur sa foi et je me fie à l’Esprit Saint qui pourra peut-être un jour souffler dans une nouvelle direction… Qui sait?
Je me soumets donc à la situation actuelle parce que je ne vois pas là de motif de révolte justifiant de claquer la porte à la communion de toute l’Église, Magistère et peuple de Dieu compris. Suis-je victime de discrimination parce que je n’ai pas accès au sacerdoce étant marié? Suis-je traité injustement parce que je ne suis ni avocat, ni médecin, ni ministre, ni riche, ni puissant, ni célèbre?
Je me vanterai plutôt d’être généralement méprisé puisque «nul n’est prophète dans son pays». Je suis un homme libre et cela me suffit. Et ce que Dieu veut, ce sont des hommes et des femmes libres qui L’aiment plus qu’eux-mêmes, Lui, notre Père.
Et Vatican II?
L’espace de cet article ne me permettrait de passer chacune des autres revendications en revue. Mais avec une bonne volonté au service d’une rationalité impartiale, on parviendrait à désamorcer ces bombes lancées contre l’Église par «LE MONDE».
Le problème avec la dissidence, c’est qu’on juge à partir d’un point de vue exclusivement extérieur, si vous me passez la redondance. On estime l’Église déphasée par rapport au contexte du monde moderne précisément parce qu’on pose sur elle un regard syntonisé à l’esprit du monde en place et lieu de l’Esprit Saint.
À la base de cette déviance, on a mal assimilé l’enseignement de Vatican II. Le Concile n’a jamais soutenu que l’Église doit se modéliser sur le monde moderne. Au contraire, si elle doit apprendre à parler le langage d’aujourd’hui, ce n’est pas pour adopter un discours complaisant mais pour interpeller les orientations perverses de nos sociétés qui mènent tout droit à l’échec et à la catastrophe. Que restera-t-il de ces fameuses revendications dissidentes lorsque notre monde moderne aura étalé dans toute son horreur ses désastreuses faillites sur tous les plans? Ouvrons les yeux! Nous sommes ici confrontés au «meilleur des mondes» de Aldous Huxley. Le cauchemar ne fait que commencer.
Inconsciemment, sans «savoir ce qu’ils font», les dissidents se rangent du côté d’un monde qui refuse le salut et voudrait effacer les traces de Jésus Christ pour avoir le champ libre: «Vous serez comme des dieux» qui déterminent «le bien et le mal» (Gn 3.5). Saint Jacques a bien dit que «l’amitié pour le monde est inimitié contre Dieu. Qui veut donc être ami du monde se rend ennemi de Dieu» (Jc 4.4). C’est encore vrai plus que jamais aujourd’hui après 2000 ans d’histoire.
Le mauvais oeuvre
Voilà pourquoi je n’endosse pas le discours dissident même si j’estime qu’il y a nombre de lourdeurs administratives que l’Église pourrait et devra changer, nombre de pompes et de magnificences fastueuses héritées de l’histoire dont elle devra se dépouiller. L’Église, je crois, redeviendra pauvre.
Cette perspective ne m’effraie pas parce que j’aime l’Église! Je la vois belle parce que je vis en son intérieur. Elle me nourrit et me guide avec amour. Je suis irradié par sa beauté spirituelle, sa splendeur mystique au travers des saints et des saintes qu’elle a enfantés pour la joie de Dieu et l’exaltation des humains, au travers de la vérité qu’elle a fait triompher sur les mensonges de l’histoire, au travers des oeuvres grandioses qu’elle a suscitées pour le bien et le salut de l’humanité.
J’aime l’Église, corps visible du Christ, et lorsqu’elle est attaquée de toutes parts, à l’intérieur par des dissidents et à l’extérieur par des incroyants, je souffre comme si c’était ma propre chair qui était ainsi mise au pilori et exposée à la risée des badauds. Je sens que derrière la façade douloureuse des contestations, c’est Jésus, dans l’invisible, que le monde flagelle et s’apprête à crucifier à nouveau.
Les dissidents sont-ils conscients de contribuer à cette oeuvre mauvaise? Ce n’est pas seulement au Québec qu’elle est en cours. Dans tous les pays jadis si chrétiens, l’entreprise satanique va bon train. L’Église devra-t-elle fatalement être malmenée partout sur la planète et mise à mort?
Des passages de la Bible le laissent entendre. Certaines prophéties confirment qu’elle devra passer par le même chemin de croix que son Sauveur. Mais comme lui aussi, elle ressurgira de la mort plus resplendissante que jamais, à la grande confusion de ceux qui la croyait éliminée pour toujours.
Une invitation
Trèves de prophéties, qu’elles soient crédibles ou non, j’exhorte les dissidents de chez nous et d’ailleurs, ceux qui aiment Jésus sincèrement, à renoncer à la démolition de l’Église d’aujourd’hui pour consacrer leurs énergies à préparer l’Église ressurgie de demain.
Oui, amen! Voici l’Alliance des chrétiens du 3e millénaire (AC3M). Que ceux qui aiment Jésus se lèvent debout à la face d’un monde de plus en plus antichrétien pour proclamer l’avènement de l’Église nouvelle dans un “monde nouveau” enfin réconcilié avec Dieu.
Vous qui aimez Jésus notre Sauveur, ce Frère humain qui révèle l’amour du Père, vous êtes mis au défi. Devenez des chrétiens du troisième millénaire. Évêques, prêtres, religieux, religieuses ou laïcs, acceptez, au milieu de l’apostasie ambiante, de montrer la voie vers un christianisme ardent capable de transfigurer le monde en un havre de paix, d’harmonie, de justice et d’amour. Devenez des chrétiens à la troisième puissance, des artisans de la civilisation de l’amour. Il ne vous sera pas demandé si vous êtes catholique, orthodoxe, protestant ou même agnostique. Enfants, ados, adultes ou âgés, venez tous! Votre sexe ou votre orientation n’entrera pas en ligne de compte. Pécheurs, prisonniers, malades, handicapés, drogués, divorcés, sidéens, vous êtes conviés à la fête de Dieu. Traditionaliste ou libéral, que votre position politique soit à gauche ou à droite, que votre peau soit blanche, rouge, jaune ou noire, vous êtes sollicité. Signez le Manifeste des chrétiens du 3e millénaire en cliquant sur l’onglet approprié du menu ci-dessus. Un manifeste pour dire au monde qu’elle vient, qu’elle arrive, qu’elle attend aux portes la fiancée «qui s’est faite belle comme une jeune mariée parée pour son époux» (Ap 21.2).