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Rencontre avec Agnès Guillier dont le troisième enfant est âgé de 14 mois, fait preuve d’une vivacité exceptionnelle et affiche un chromosome en plus. Elle participera avec lui à « La course des héros », dimanche 18 juin.

Sylvain Dorient

Quand vous dites le nom de son fils, « Saül », inutile de prononcer le tréma. C’est un clin d’œil, assure Agnès Guillier « il a un chromosome en plus, alors je lui ai mis deux petits points ». Pendant que ses deux grands, 11 et 12 ans, jouent avec le petit dernier, elle se prépare mentalement à la course des héros organisé par la Fondation Jérôme Lejeune dans l’équipe Tombée du nid. « Je n’ai aucun entraînement… mais on va s’en sortir ! »

Dimanche 18 juin, elle parcourra « à son rythme » six kilomètres au parc de Saint-Cloud équipée de chaussures neuves et d’une poussette pour son garçon… Elle ne sera pas seule : beaucoup de parents d’enfants atteints de trisomie, qu’elle a surtout connus par les réseaux sociaux, ont prévu de participer à la course. Quand on est parent d’enfants différents, on appartient à une communauté d’enfants à part. « C’est un autre monde », assure Agnès.

Avec son Saül, elle a découvert qu’il n’est pas facile de parler de trisomie 21 avec des parents qui n’ont pas fait l’expérience du handicap. Elle s’est sentie seule, parfois agacée par l’absence d’empathie, voire la crainte que son garçon suscitait. Ce garçon, bien sage pourtant, qui « ne pleure presque pas ». La preuve, il écoute, médusé, sa maman parler pendant notre entretien : il est en train d’apprendre les syllabes.

Lors des échographies, Agnès aurait pu s’effondrer. Elle est alors mère célibataire de deux enfants. Le médecin lui annonce qu’il y a un risque de trisomie 21 : « J’étais effrayée ». Pour comprendre ce qui lui arrive, elle navigue sur Internet, et découvre la vidéo interdite par le CSA « Dear future mom ». « Je crois que je n’ai jamais envisagé autre chose que de mettre au monde ce bébé, mais cette vidéo, et d’autres témoignages, m’ont fait un bien fou dans la semaine qui a suivi l’annonce du médecin ».

Au rendez-vous suivant elle demande au médecin : « Cet enfant pourra marcher, parler, écrire ? Alors je le garde ! » Elle jette un coup d’œil à Saül qui en a assez écouté et se déplace, en rampant, de l’autre côté de la pièce : il commence à marcher à quatre pattes.

« Dans quoi tu t’embarques ? »

Sa grande famille – elle a neuf frères et sœurs – la soutient unanimement, bien qu’un frère ait joué aux « avocats du diable ». « “Dans quoi tu t’embarques ?” s’inquiétait-il… Aujourd’hui c’est le parrain de mon garçon ! ». Ses collègues aussi étaient inquiets, et avaient du mal à comprendre sa décision. Depuis l’une d’entre elles lui a annoncé que si elle était confrontée à sa situation, elle ferait le même choix. Agnès s’est « embarquée » dans ce qu’elle voit comme une mission : « J’ai été adoubée ».

Au moment de la césarienne, en urgence car le cœur de son bébé ralentissait, on lui a demandé par deux fois, avant d’inciser « si on faisait tout pour l’enfant »… Pourtant cet enfant et cette mission « lui donnent beaucoup de bonheur », à elle et à sa famille. Pendant les premiers jours de Saül, les psychiatres qui défilaient dans sa chambre repartaient rapidement : cette maman n’avait pas besoin de leurs services. « Saül est adoré par toute la famille. C’est un bébé très actif, très débrouillard… ». Comme pour confirmer les paroles de sa maman, il se met à babiller, s’adressant à l’un de ses frères aînés.

Le bonheur affiché par cette mère en mission est presque déconcertant. Pourtant, la première chose à dire à la mère d’un enfant trisomique est « félicitations », assure-t-elle. Elle accompagne en ce moment même une maman qui connaît une situation comparable, avec son adorable bébé de deux mois. Quant à Saül, il a des envies de ménage de printemps : il a attrapé un grand balai qu’il traîne derrière lui tandis qu’il escalade une marche.

 

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