Une justification sur le dos de l’Église
La justification du premier ministre Trudeau pour maintenir Amira Elghawaby à son poste m’a laissé pantois. Je demeure encore abassourdi par la “thèse sociologique” qu’il a donnée du problème soulevé par cette nomination. Apparemment, notre chef d’État partage la perception de madame Elghawaby sur une présumée islamophobie des Québécois. Elle proviendrait selon lui de l’Église à laquelle le Québec a été soumis avant la révolution tranquille, une religion qui ne respectait pas les droits et libertés individuels.

Ce serait donc le traumatisme infligé par le catholicisme qui aurait créé, chez les Québécois, plus qu’ailleurs au Canada, une distance, et même une méfiance de la religion (de la religion islamique, faut-il supposer). On devrait comprendre que les Québécois, tout juste libérés de l’emprise ecclésiale, craignent de perdre leur liberté avec les nouveaux venus, ce qui conditionnerait leur biais anti-islamique, a laissé entendre le politicien visiblement mal à l’aise.
Si je comprends bien ces raisonnements gravement tarabiscotés, le premier ministre prétendrait enrayer l’islamophobie québécois par la “catholicophobie”. Simple, non ?
Mais les faits historiques et actuels ne peuvent absolument pas justifier l’“analyse” boiteuse de monsieur Trudeau. L’Église n’a jamais brimé les droits humains chez nous ou ailleurs. Bien au contraire, c’est elle qui a enseigné à l’humanité depuis 2000 ans le concept de l’inaliénable dignité de la personne humaine. Et ceci, souvent à l’encontre de pouvoirs politiques coercitifs – entre autres dans certains pays à prédominance islamique et sans que notre leader national semble s’en inquiéter – qui piétinent sans vergogne les droits fondamentaux des chrétiens, détruisent leurs églises, les emprisonnent sans procès, les condamnent à mort notamment pour de faux blasphèmes contre l’Islam, et les assassinent. Tout cela, depuis des décennies. Selon AED et Amnistie internationale, il y a aujourd’hui plus de victimes de persécution sanglante des chrétiens que dans toute l’histoire précédente du christianisme.
Quant au présumé rejet par la population québécoise des communautés et cultures minoritaires, faut-il rappeler que le peuple francophone est aussi une minorité dans l’ensemble canadien ? Avant de laisser entendre que le Québec maltraite les autres cultures et communautés du simple fait qu’il doive prendre des mesures pour survivre en tant que nation, le premier ministre devrait plutôt exercer son jugement sur le traitement historique que les gouvernements canadiens ont réservé aux minorités francophones du pays… et aux autochtones.
Les autochtones ? Voilà un autre dossier qui mériterait d’être revisité. En toute objectivité et sans la hargne contre l’Église que le premier ministre canadien s’est évertué à médiatiser en projetant sur elle la responsabilité des traitements odieux de nos frères autochtones dont la société canadienne, sous le gouvernement fédéral, s’est rendue coupable. Un génocide culturel a dit le pape lors de sa venue. Non pas l’œuvre de l’Église – selon ce que Justin Trudeau a voulu faire accroire à la population ؘ– mais l’œuvre de la politique historique d’assimilation culturelle de l’État canadien. Une politique, heureusement, qui n’a pas encore réussi à anéantir notre peuple.