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Au commencement, Dieu créa le ciel et la terre (Gn 1, 1).

Lorsque l’auteur du premier récit de la création de la Genèse affirme que Dieu a créé «le ciel et la terre», il fait forcément allusion à tout ce qui existe. S’il avait eu accès à notre vocabulaire moderne, plutôt que d’évoquer ciel et terre, il aurait pu utiliser le terme univers. Dans la culture dominante d’aujourd’hui, toutefois, l’on charcute souvent ce concept de la moitié de son sens. On l’associe à l’ensemble des réalités objectives et, particulièrement, aux spectaculaires phénomènes cosmiques observés par les astrophysiciens.

Mais l’univers n’est pas que la somme de la matière cosmique et terrestre. La conscience humaine en est partie prenante.

Mais l’univers n’est pas que la somme de la matière cosmique et terrestre. La conscience humaine en est partie prenante.

Mais l’univers n’est pas que la somme de la matière cosmique et terrestre. La conscience en est partie prenante. Son invisibilité n’en fait pas une réalité négligeable. Elle compte en fait tout autant que le visible puisque le concept de l’univers ne peut être saisi que par la raison.

Or, la rationalité humaine fait suite à l’immense labeur de l’évolution biologique sur notre planète. Lorsque l’on conçoit l’univers exclusivement comme une quantité de matière extérieure à la conscience, c’est le côté qualitatif et moral de la vie qui échappe alors à nos considérations. (Note : Pour le développement de cet argument, voir le 7e entretien, La philosophie quantique, de mon ouvrage L’évolution de l’Alpha à l’Oméga, disponible sur ce site en format papier ou numérique.)

Le concept de l’univers ne va donc pas sans la conscience humaine. Et c’est par elle que se révèlent d’innombrables réalités invisibles – par exemple, les esprits angéliques. C’est pourquoi notre scribe biblique, en utilisant le vocable univers, aurait tenu à préciser ses composantes fondamentales. La distinction entre ciel et terre signale en effet une double face de la réalité créée : le terrestre et le céleste.

Ce qui appartient au terrestre est concret et formé à partir de la substance matérielle dont la genèse renvoie certes au cosmos. Tandis que le céleste désigne l’intangible monde spirituel et vital – indétectable par les sens ou les outils qui en prolongent l’efficacité – que seul l’esprit en l’être humain peut appréhender. Si donc je paraphrase le premier verset du premier récit de la création, j’écrirai ceci en toute cohérence avec le Symbole de Nicée-Constantinople : Au commencement, Dieu créa l’univers visible et invisible.

Le ciel ou le cosmos ?

L’on pourra objecter que le scribe, en évoquant le ciel, a pu vouloir désigner les inaccessibles réalités cosmiques dont il ne reconnaissait peut-être pas la nature matérielle. L’on sait, en effet, que certaines cultures antiques rendaient un culte aux astres au titre d’entités divines. Mais ce qui montre qu’il a voulu expressément écarter une telle interprétation, c’est le fait qu’il emploie plus loin un autre terme pour désigner le lieu du déploiement des corps célestes.

Dieu dit : “Qu’il y ait un firmament au milieu des eaux et qu’il sépare les eaux d’avec les eaux” et il en fut ainsi. Dieu fit le firmament, qui sépara les eaux qui sont sous le firmament d’avec les eaux qui sont au-dessus du firmament, et Dieu appela le firmament “ciel”… qu’il y ait des luminaires au firmament du ciel pour séparer le jour et la nuit… » (Gn 1, 6.14).

La distinction entre le ciel et le firmament incite donc à dissocier les réalités célestes invisibles de la matérialité de l’espace sidéral. Or, lorsque le scribe affirme que Dieu a entrepris de créer ciel et terre, il implique que les réalités invisibles ont eu un même commencement que les réalités visibles. Les invisibles comme les visibles ont toutes été créées sans qu’il y ait eu de précédent à leur existence… À partir de rien, devons-nous présumer.

Ce qui n’est pas peu dire dans le contexte des conceptions antiques. Car les philosophes qui scrutaient le réel pour en déduire le sens estimaient ou bien que la matière est éternelle, fut-ce sous la forme d’atomes, ou bien que l’existence tangible est en quelque sorte une dégradation de l’intangible et représente une chute du monde de l’esprit dans la matière.

Le premier énoncé de la Bible, en imputant un même commencement au visible et à l’invisible, révèle au contraire que les deux vont de pair, que les deux coexistent. Ce ne sont pas deux univers parallèles, deux mondes opposés l’un à l’autre mais deux faces d’une même et unique réalité que Dieu a créée.

L’univers invisible

Cette révélation est on ne peut plus pertinente pour nous aujourd’hui. À une époque où l’on ne jure que par les causes matérielles, l’invisible se heurte généralement au scepticisme ambiant. Et pourtant, l’invisible crève les yeux… si je peux me permettre cette antilogie. Dans le monde humain, l’invisible est effectivement partout.

Voyez cet arbre là-bas ? C’est un chêne. Comment le sais-je ? Ce ne sont pas mes yeux qui me le disent. Personne n’a jamais vu objectivement l’espèce du chêne. Elle est déduite de l’observation de caractères communs à tous les spécimens. Au-delà des apparences sensorielles, la faculté rationnelle saisit l’invisible trame structurelle sous-jacente à l’arbre particulier.

Et il en est de même pour toutes les réalités auxquelles la raison donne un nom. Elles relèvent toutes de l’invisible. Il n’existe aucune perception sensorielle qui pourrait m’autoriser à dire que tel objet est une table ou autre chose. Les sens ne perçoivent que des surfaces sans signification particulière tandis que la raison doit appréhender la structure intelligible des choses pour les comprendre et les nommer.

La raison elle-même, qui émerge inévitablement de la subjectivité des personnes, ne fait-elle pas partie de l’univers invisible ? C’est par la rationalité invisible que l’invisible peut être identifié, de sorte que toutes les formes de connaissances ressortent de catégories invisibles de l’univers.

Comment associer encore les réalités invisibles aux superstitions ? Les refuser ne reviendrait-il pas à rejeter le pouvoir de connaître de la rationalité ? Et il y a plus ! En tant que personnes humaines, ne sommes-nous pas tous des êtres invisibles ? Lorsque nous disons « je suis », n’affirmons-nous pas que nous possédons l’être ? Mais où trouver l’être pour que nous puissions le voir et l’ausculter ? L’être est partout, et pourtant, nulle part peut-il être observé.

Vous me direz que mon existence est évidente pour tout le monde. Je réponds que vous voyez mon organisme, mon corps, mais l’être en moi, vous ne le voyez pas. Je ne suis pas un corps ; je suis dans un corps. La nuance est cruciale. Si je n’étais qu’un corps, je ne pourrais pas savoir que je suis. Si je n’étais qu’une quantité de matière, je ne pourrais pas accéder à la qualité d’être un organisme vivant. Pour le savoir, il faut qu’un abîme s’interpose entre mon corps et la conscience que je suis.

La conscience d’être, c’est le portail d’entrée de l’univers invisible et la prérogative d’une âme spirituelle. Être est un mystère qui renvoie nécessairement à l’Être Suprême. Car l’être éprouvé par la conscience au présent est incomplet en ce qu’il n’est ni permanent ni constant dans l’espace et le temps, survenant dans un corps mortel. De plus, je ne suis pas la cause de l’être que je suis. Je reçois l’être comme un don. C’est pourquoi je reconnais ma dépendance de Celui qui possède tout l’Être et a le pouvoir de le partager. Je suis parce que j’ai été créé… et l’existence de la créature appelle nécessairement un Créateur capable de faire exister et «le ciel et la terre», soit les réalités invisibles aussi bien que les visibles, ce qui est qualifiable aussi bien que ce qui est quantifiable, ce qui est subjectif aussi bien que ce qui est objectif.

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2 réponses à 3- La Genèse revisitée – « …le ciel et la terre »

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