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Isabelle Cousturié

Plus de rites, un autel vide, les cloches ne sonnent plus, même Dieu s’est caché… Ce passage entre la mort du Christ et sa résurrection interpelle chaque chrétien.

« Le Père n’a dit qu’une parole : son Fils. Il la dit toujours dans le silence, un silence sans fin. C’est dans le silence qu’elle peut être entendue », déclare saint Jean de La Croix dans ses Maximes en expliquant le grand silence de Dieu, le Samedi saint. Ce jour, sans rite particulier, marque le passage entre la mort du Christ et sa résurrection. Que se passe-t-il ? L’homélie ancienne pour le grand et saint Samedi, lue à l’office des lectures, décrit parfaitement l’atmosphère de deuil et d’attente qui règne ce jour-là : « Aujourd’hui, grand silence sur la terre ; grand silence et ensuite solitude parce que le roi sommeille. La terre a tremblé et elle s’est apaisée, parce que Dieu s’est endormi dans la chair et il a éveillé ceux qui dorment depuis les origines ».

« Dieu est caché »

Philippe de Champaigne, le Christ mort sur son linceul, avant 1654 © Wikipedia

Dans le prolongement du Vendredi saint, les chrétiens sont invités, par la prière et le jeûne, à vivre le Samedi saint non pas comme une parenthèse mais comme un temps de ressourcement intérieur, source de réconfort et espérance. Pour certains, cela peut être particulièrement douloureux, car il renvoie à tous les moments tragiques où, face à un drame – une maladie, un accident, une injustice, voire même la mort – ils peuvent avoir ressenti cette absence de Dieu, alors qu’ils Lui criaient leur douleur. Incompréhensible ? Non, mystérieux !

Benoît XVI, à l’occasion de la vénération du Saint-Suaire, à la cathédrale de Turin, en 2010, fait une belle méditation sur ce mystère. Devant le saint Linceul, « icône » parfaite de ce qu’était le corps de Jésus étendu dans le tombeau au cours de cette période, il décrit ce moment de silence. Ce « Dieu est caché », dit-il, « fait partie de la spiritualité de l’homme contemporain, de façon existentielle, presque inconsciente, comme un vide dans le cœur qui s’est élargi toujours plus ». L’obscurité de ce jour interpelle tous les chrétiens qui s’interrogent sur leur vie, et de façon particulière nous interpelle, nous croyants. Nous aussi nous avons affaire avec cette obscurité.

Le Saint-Suaire, icône du Samedi saint

L’obscurité de ce jour interpelle donc tous ceux qui s’interrogent sur la vie, et de façon particulière les croyants. Car chacun peut avoir affaire avec cette obscurité. Mais « le mystère le plus obscur de la foi est dans le même temps le signe le plus lumineux d’une espérance qui ne connaît pas de limite », a rappelé le Pape émérite. Et c’est pourquoi le Saint-Suaire se présente comme un parfait document « photographique », doté d’un « positif » et d’un « négatif ».

De l’obscurité de la mort du Fils de Dieu est apparue la lumière d’une espérance nouvelle : la lumière de la Résurrection. Et si des milliers et des milliers de personnes le vénèrent c’est parce qu’en lui « elles ne voient pas seulement l’obscurité, mais également la lumière ; pas tant l’échec de la vie et de l’amour, mais plutôt la victoire, la victoire de la vie sur la mort, de l’amour sur la haine ».

Repos salutaire  

La liturgie du Samedi saint célèbre aussi la descente du Christ aux enfers. Que signifie cette expression ? Elle signifie que Dieu, s’étant fait homme, « Il est arrivé au point d’entrer dans la solitude extrême et absolue de l’homme », nous dit Benoit XVI, mais il est demeuré dans la mort et a franchi la porte de cette ultime solitude « pour nous guider également à la franchir avec Lui ». Voilà le remède pour combattre ce sentiment d’abandon que l’on peut ressentir face à des situations tragiques : se répéter à l’infini « qu’à l’heure de la solitude extrême, nous ne serons jamais seuls ». Le Samedi saint, les cloches des églises se taisent. « Tout est accompli » (Jn 19, 30). Ce repos est salutaire. Dans quelques heures, la résurrection du Seigneur apportera une nouvelle lumière pour renaître à une vie nouvelle. Alors comme dit saint Paul aux Romains, « le Seigneur ressuscité est l’espérance qui ne faiblit jamais, qui ne déçoit pas (cf. Rm 5, 5), il n’y a plus qu’à profiter de ce Samedi saint pour réfléchir à la portée salvifique de ce jour de grand silence et se préparer à accueillir la grande joie de Pâques!

 

 

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